Dans l’air, dans l’eau, le microplastique dérègle le climat
Le microplastique impacte le climat. Et celui-ci joue un rôle aussi bien dans l’air que dans l’eau. Revue des faits et des avancées récentes.
Pollution dans l’eau
L’effet des microplastiques présents dans les océans sur le climat a été parfaitement étudié au travers de deux études notamment : [2] [3]. L’impact est multifactoriel. Tentons de résumer simplement.
>> Pollution des océans par le plastique et les emballages.
Phytoplancton
Au niveau du phytoplancton (aussi dit plancton végétal, qui constitue l’ensemble des végétaux microscopiques et unicellulaires aquatiques) :
- Les microplastiques ont un effet perturbant sur leur développement via différents modes. En réfléchissant l’incidence solaire, ils affectent la. capacité de photosynthèse du phytoplancton, consommatrice de CO2. Plus les particules sont petites, plus fort est l’effet.
- La toxicité des microplastiques, par ailleurs, modifie leur métabolisme et leur reproduction. Ceci peut réduire de 45% la photosynthèse produite.
- Ce phénomène est exactement le même sur les algues avec des retentissements équivalent sur la photosynthèse.
Zooplancton
Au niveau du zooplancton (aussi dit plancton animal, herbivore ou carnivore et qui se nourrit de phytoplancton) :
- Les microplastiques détériorent le métabolisme du zooplancton ce qui se traduit par une diminution de la ration alimentaire de 40% de ce dernier, entrainant une perte équivalente de la réduction de la biomasse carbone.
- Des études ont montré que les microplastiques se transmettaient lors de la chaine alimentaire vers le zooplancton de plus grosse taille, ce qui contribue à amplifier, le long d’un cercle vicieux, le phénomène précédent.
- Enfin il est démontré que les matières fécales générés coulent plus lentement sur le fond des océans lorsqu’elles sont chargées en microplastiques, ceci réduisant la proportion de carbone capté par le fond des océans.
Différents niveaux d’impact du microplastiques sur le phytoplancton et le zooplancton [3].
Pollution dans l’air
Un effet bénéfique ?
Ce matin on a (tenté de) m’expliquer que « les microplastiques allaient permettre de lutter contre le dérèglement climatique ». Source à l’appui : « j’invente rien, c’est une étude Néo-Zélandaise très sérieuse qui le dit ».
Lutter comment ? C’est très simple : « les microplastiques en suspension dans l’air ont un effet refroidissant car ils réfléchissent le rayonnement solaire ».
C’est vrai qu’elle est très sérieuse cette étude Néo-Zélandaise qui traite de l’effet du forçage radiatif induit par les microplastiques, et certaines de ces affirmations sont exactes. Mais si on se penche en détail sur les résultats… on comprend qu’on est pas sauvés pour autant…
Fake news et intelligence artificielle faussent souvent le débat et diminuent les capacités de réponse, voir par exemple : La pollution des océans selon l’Intelligence Artificielle de ChatGPT. Vérifions tous la qualité des sources que nous utilisons.
Microplastique et climat : l’étude de référence
L’étude menée en octobre 2021 par Laura E. Revell et ses collègues (University of Canterbury, Christchurch, New Zealand) [1] a pour but d’évaluer l’impact de deux types de particules plastiques dans l’air (fibres et fragments) sur le climat mondial.
Les conclusions sont précisément celles-ci :
- L’effet des microplastiques est effectivement refroidissant mais :
- celui-ci est plusieurs centaines de fois inférieur à celui induit par les autres particules en suspension dans l’air (qui ont également un effet globalement refroidissant)
- les microplastiques se retrouvent sous des formes différentes : fibres, fragments et combinés… qui n’ont pas le même effet. Selon les auteurs, un dénombrement précis reste nécessaire pour consolider les données actuelles.
Les auteurs concluent en précisant que l’évolution rapide de la production de résine plastique, d’une part, et le phénomène d’accumulation d’autre part, tendent à augmenter, avec le temps, les phénomènes précités.
Distribution des rôles, en termes de forçage radiatif des différentes particules en suspension dans l’air (en gris les particules classiques connues, en noir les microplastiques étudiés dans le cadre de l’étude. On constate que le forçage radiatif des microplastiques est globalement négatif (refroidissement) mais qu’il est faible et non significatif par rapport aux autres particules [1].
>> Plastique : vers 15 % du budget carbone 2050, une envolée à bas bruit.
Microplastique et climat – Sources :
[1] Revell, L.E., Kuma, P., Le Ru, E.C. et al. Direct radiative effects of airborne microplastics. Nature 598, 462–467 (2021).
[2] (Micro)plastic crisis: Un-ignorable contribution to global greenhouse gas emissions and climate change ; Maocai Shen & al. ; College of Environmental Science and Engineering, Hunan University and Key Laboratory of Environmental Biology and Pollution Control, Changsha, China
[3] Atlas du plastique 2020, Fondation Heinrich-Böll Stiftung, la Fabrique Écologique et le mouvement Break Free From Plastic
• Production, use, and fate of all plastics ever made, Jenna R. Jambeck, Law Sci. Adv. 2017
> image à la Une : image issue de [2], droits Maocai Shen & al.
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